Eh beh ! Si un jour on m’avait dit que je dormirais dans une chambre d’hôtel à Bogota ! Oui, Bogota ! Capitale de la Colombie, le pays de Pablo Escobar, le plus grand baron de la drogue de tous les temps… le pays le moins recommandable de toute l’Amérique latine selon les classements touristiques internationaux… Voilà où nous mènent les drôles d’idées de M. Anthony ! De Quito à Bogota, comme ça, sur un coup de tête !
Dans la vraie vie, et en arrivant sur place, on découvre cette ville à la densité humaine inouïe. C’est d’abord une ambiance festive hors du commun, de la musique à tous les coins de rue, dans chaque bar, dans chaque « tienda » comme on dit ici. Aucune morosité ne peut s’installer durablement dans ces quartiers-là. Ça n’existe pas, la morosité. Interdit ici. Alors les murs des maisons se racontent en graffitis. Partout. Le graffiti est un art local de premier ordre. Une présence prégnante et culturelle diffuse. Les graffitis sont dans les moindres recoins susceptibles de témoigner d’un passé. Ou dénoncer le présent. Message politique et court d’une population appauvrie. Dessin rapide des contradictions sociales entre joie de vivre et « vie de rue » pour beaucoup de Colombiens…
Et derrière le graffiti, il y a la danse. Un trésor national. Ultime outil de l’homme dans le jeu des séductions. « Qui ne sait pas danser ne sera pas marié ! ». C’est sûr que ça change de nos corps robotisés dans nos discothèques européennes trop bruyantes et surpeuplées. Parce que la danse ici, c’est la vie. C’est de la poésie. C’est même un sujet de dictée d’Orthodidacte ! Pour dire ! C’est ce que nous raconte Carla, à la « Candelaria », centre animé de Bogota qui fait lieu de vie et de rencontres pour tous ceux qui ont envie d’un moment de France… Carla est enseignante à l’université de Bogota. Et vous savez quoi ? Elle cause, Carla, elle cause de son pays, de ses contradictions, de ses peurs et de ses désirs. Parce que Carla, elle a une expérience de vie comme jamais. Alors on l’écoute nous dire comment la Colombie est un beau pays sous tension, où l’histoire se mélange avec la violence, qu’elle soit sociale ou criminelle. Où même le choix d’une langue est d’abord un choix géopolitique. Parce qu’ici, apprendre le français, c’est un peu refuser la toute puissance de l’Amérique américaine. Parce qu’on a pas forcément besoin de l’anglais pour comprendre le monde. C’est de ça qu’elle nous parle Carla… Elle nous raconte aussi que le français est, comme souvent dans ce coin d’Amérique latine, choisi par les élites pour se distinguer. Apprentissage d’abord dans les écoles privées et les universités. Il faut dire que le français est d’abord vécu comme une histoire culturelle, une histoire de littérature, une histoire d’arts et de lumières… représentation constante de notre langue dans le monde qui reflète pourtant l’écart entre la réalité de notre pays et le mythe porté par notre langue… on apprend aussi que le français donne souvent du travail ici comme ailleurs. Ça, on le sait moins. Qui parle français ne connaît pas la crise !
Mais revenons à la dictée… Alors Carla, avec ses étudiants, ils ont participé à la rédaction d’une des dictées Orthodidacte ! Eh oui ! C’est pas Guillaume Terrien tout seul qui les construit, ses dictées ! Non non non ! Notre champion se fait aider parfois ! C’est même une des fonctionnalités de la plateforme. Vous ne le saviez pas ? Bref, présentement, ce sont les étudiants de Carla qui ont élaboré le texte de la dictée sur le thème bien sûr de la danse… Allez, je vous laisse chercher la dictée concernée sur le site et vous n’hésiterez pas à vous exercer dès ce soir !
En tout cas, Carla a une passion dévorante pour notre langue. Dans un discours humaniste désarmant de simplicité. Parce que Carla, elle rêve aussi de richesses partagées et d’enfants dans les écoles et non dans les rues… Carla, c’est un peu la théorie du colibri. Elle fait sa part…
Et nous, en cette fin de journée, avec Anthony, on est un peu tristes. Tous les deux, nous avons encore partagé des moments de grande beauté avec des gens extraordinaires. Carla et tous les autres. Amis d’un jour, acolytes d’une soirée, copains d’une semaine… On gardera des sourires, du bruit, du goût et de la vie de ce moment de Bogota. Et comme toujours, au moment de partir, quelques émotions s’écoulent de nos mains dans la moiteur d’une Amérique latine… un dernier voyage avec le funiculaire sur la colline de Monserrate à 3152 m d’altitude qui offre une vue sur Bogota et ses onze millions d’habitants…
Et là-haut, Anthony me regarde. Je le regarde. On se regarde. Et vous savez quoi ? Il me dit « et si on plongeait dans le cartel de Médellín »… le pays de Pablo Escobar ? Il est incroyable, ce garçon, vous ne trouvez pas ? Et c’est reparti mon Polo…
P.S. : au cas où, retrouvez ici la dictée dont nous parlions 🙂